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European Film Festival (EFF)
Présentation
Au sein des politiques culturelles nationales et des relations culturelles internationales de l'Europe de l'entre-deux-guerres, le cinéma s'imposa de plus en plus comme un domaine important. En témoigne notamment la mise en place des premiers festivals de cinéma, tout à la fois lieu d'exposition nationale, de rencontres et de diffusion internationales de films de fiction ou documentaires. En 1932 fut ainsi créée la Mostra de Venise par le régime fasciste de Benito Mussolini qui sut s'emparer du cinéma pour sa propagande intérieure et internationale. Trois ans plus tard, en 1935, ce fut au tour de Moscou de lancer son premier festival international de films. Si l'expérience soviétique ne put se renouveler au-delà de la première année, la Mostra connut par contre un succès immédiat auquel s'associa rapidement le régime nazi. Dès leurs origines, les festivals internationaux de cinéma en Europe relevèrent donc d'enjeux diplomatiques et politiques. Les démocraties choisirent ainsi de créer leur festival pour contrecarrer la Mostra: le projet de Cannes vit alors le jour. La guerre qui éclata en septembre 1939 entraîna l'annulation du premier festival sur la Riviera, mais ne fit pas mourir le projet.
De fait, après 1945, apparurent toute une série de festivals de cinéma dans l'Europe de l'après-guerre. Le mouvement amorcé avant 1939 prit dès lors une autre dimension. Dans un nouveau contexte international, où les pratiques comme les productions culturelles jouèrent un rôle essentiel dans les différentes formes de confrontation Est-Ouest et au sein même des deux blocs en présence, un réseau de manifestations internationales se mit rapidement en place : Karlovy Vary (1946) et à nouveau Moscou (1959) à l’Est, à l’Ouest Locarno (1946), Cannes (1946) puis la Berlinale à Berlin-Ouest (1951) et San Sebastian (1953). Au tournant des années 1960, il existait donc un important réseau de festivals de cinéma couvrant l’Europe de l’Est comme de l’Ouest, qui s’avèrent des lieux d’observation ouvrant de nouvelles perspectives pour une histoire culturelle de l'Europe de la guerre froide.
Très rares sont cependant les recherches sur ce sujet. Les quelques études existantes sont surtout des monographies présentant le plus souvent un tableau partiel ou anecdotique de tel ou tel festival. Or, il est certes important, dans un premier temps, de resituer la naissance des différents festivals dans leur contexte national spécifique et sous l’influence croisée des différentes étapes de la guerre froide. La spécificité de chaque lieu et de chaque moment apparaît ainsi clairement. Toutefois, l’histoire des festivals montre également combien ils ont évolué en étroite interaction entre eux, dans une constante dynamique de concurrence et de confrontation, intégrant des influences sociales, politiques, économiques, culturelles et artistiques dépassant les seules limites nationales, donnant lieu à des processus d’appropriation ou d’acculturation. Une histoire des festivals de cinéma dans l’Europe d’après 1945 ne saurait donc être seulement une juxtaposition de parcours distincts ou une comparaison étudiant, à partir d’un seul point de vue, les interactions évoquées. Il s’agit plutôt de retracer l’histoire d’un réseau, de son installation et de son évolution entre les différents lieux à travers l’Europe de la guerre froide. Pour cela, il s’agit de montrer comment ces relations et contacts sont nés, quels en ont été les différents acteurs et passeurs - institutionnels ou non - et quelles influences les festivals ont eu les uns sur les autres au cours de la période étudiée.
Le projet, porté par le CERHEC, le CHCSC et l'IRICE, a pour ambition de créer autour de ces pistes de recherche un réseau international de chercheurs issus de différentes disciplines - histoire, sociologie, études cinématographiques, civilisations, communication. Il s'agit d’abord de dresser une cartographie des sources, un état des lieux et un bilan des travaux existant, puis de lancer des recherches (masters, doctorats, projets post-docs...) dans les différents pays à partir des fonds d'archives concernés. Les monographies établies à partir des sources de chaque pays permettront la mise en perspective des différents festivals autour de trois grands thèmes et moments :
1- La phase de création des festivals: enjeux locaux, nationaux et internationaux (années 1930-1950)
Dans deux contextes distincts -la période de l'entre-deux guerres (avec la confrontation entre régimes démocratiques et régimes autoritaires) puis celle de l'après 1945 (dans une période de reconstruction et de guerre froide)- est née puis s'est développée une Europe des festivals internationaux de cinéma. L'analyse précise des contextes de leur création -nationaux et internationaux, sans oublier les enjeux locaux dans ce jeu d'échelles complexe- permet de souligner combien ces festivals de cinéma s'inscrivent dans toute une série d'enjeux économiques, culturels, politiques qui en font des événements très importants pour une histoire culturelle de l'Europe contemporaine.
2- Les évolutions des festivals et de leur réseau au rythme de la guerre froide (années 1950-1980)
Dans l’étude des relations internationales du temps de la guerre froide en Europe, les relations culturelles font désormais partie des terrains largement ouverts à la recherche. Les pratiques comme les productions culturelles ont joué un rôle essentiel dans les différentes formes de confrontation Est-Ouest mais aussi au sein même des deux blocs en présence. Les médias, et tout particulièrement le cinéma, y ont tenu une place privilégiée à travers une guerre d’images imprégnant le quotidien des Européens. L'étude de la concurrence entre festivals de l'Est et de l'Ouest, mais aussi de la répartition des rôles au sein d'un même bloc, souligne la complexité des relations culturelles internationales du temps de la guerre froide.
3- Les festivals et les nouvelles cinématographies (années 1960-1970)
Des années 1960 aux années 1970, les festivals internationaux de cinéma en Europe ont été les témoins de l'émergence de nouveaux cinémas. Les mouvements des Nouvelles vagues en Europe et dans le monde se retrouvent notamment à Cannes, à Venise, à la Berlinale, qui deviennent des tribunes essentielles pour ces jeunes cinéastes. À la suite des revendications de 1968, qui ont également touché le cinéma et l'organisation des festivals, des sélections parallèles voient le jour (Un certain regard à Cannes, Forum à Berlin) où l'on va retrouver les nouvelles cinématographies des pays du Sud mais aussi les productions des dites minorités (cinéma féministe, défendant la cause homosexuelle par exemple). Les festivals jouent le rôle de passeurs entre ces jeunes cinématographies et les producteurs et diffuseurs ainsi que le public des pays européens.
Le comité de pilotage
-en Allemagne : Lars Karl (ZZF, Potsdam/Humboldt Universität, Berlin) et Vinzenz Hediger (université de Bochum).
-en Espagne : Vicente Sanchez-Bioca (université de Valencia) .
-en France : Robert Frank (université Paris I), Sylvie Lindeperg (université Paris I) et Caroline Moine (UVSQ).
-en Grande-Bretagne : Lucy Mazdon (université de Southampton).
-en Italie : Leonardo Quaresima (université d'Udine).
-en République tchèque : Petr Szczepanik (université de Brno).
-aux Etats-Unis: Vanessa Schwartz (université de Caroline du Sud).
Ce comité de pilotage est en charge de la coordination des recherches et des différentes rencontres qui auront lieu au cours des six années du projet (journées d'études et colloques) qui se déroulera en plusieurs phases. La première période 2008-2009 est une phase préparatoire, permettant de mettre en place le réseau. Les premières manifestations auront lieu à partir de 2010 jusqu'en 2014.
Outre différentes manifestations qui se dérouleront dans les laboratoires porteurs et les institutions partenaires, le projet prévoit trois publications principales autour des trois grands thèmes retenus et une base de données offrant un catalogue des sources et des informations sur les différents lieux d'archives et rendant facilement accessibles les travaux menés en commun.